Pouvoir judiciaire
Article 100
La justice est un pouvoir indépendant. Elle veille à l’instauration de la justice, à la garantie du respect de la Constitution, à la souveraineté de la loi et à la protection des droits et des libertés.
Les magistrats sont indépendants. Ils ne sont soumis dans l'exercice de leurs fonctions qu'à l'autorité de la Constitution et de la loi.
Article 101
Le magistrat doit être compétent, intègre et neutre ; Il doit répondre de toute défaillance dans l’accomplissement de ses fonctions.
JURIDICTION JUDICIAIRE ADMINISTRATIVE ET FINANCIÈRE
Article 102
Les magistrats sont nommés par le Président de la République sur proposition du Conseil supérieur du pouvoir juridictionnel.
Article 103
Le magistrat ne peut être muté, sans son accord, et il ne peut être suspendu de ses fonctions que dans les cas et selon les garanties formulées par la loi et par décision motivée du Conseil supérieur du pouvoir juridictionnel.
Le magistrat ne peut être suspendu de ses fonctions ni relevé ni faire l’objet d’une sanction disciplinaire, sauf sur décision du Conseil supérieur du pouvoir juridictionnel.
Article 104
Le droit d’ester en justice et le droit de défense sont garantis.
Les justiciables sont égaux devant la justice.
La loi garantit des tribunaux à deux niveaux et assure aux plus démunis l'accès à la justice.
Toute personne a le droit à un procès équitable.
Les audiences des tribunaux sont publiques, sauf si la loi prévoit le huis clos. Les jugements ne sont rendus qu'en audience publique.
Article 105
Les catégories de tribunaux sont créées par une loi organique, la création de tribunaux d’exception est interdite et l’édiction de procédures exceptionnelles visant à affecter les principes d'un procès équitable sont interdites.
La justice militaire est une justice spécialisée, une loi organique régie son fonctionnement, sa composition, sa structure et sa procédure.
Article 106
Toute ingérence dans la justice est un crime puni par la loi.
Article 107
Les jugements sont rendus et exécutés au nom du peuple. Leur inexécution ou entrave de la part des autorités compétentes sans motif légal est un crime imprescriptible.
LE CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE
Article 108
Le Conseil supérieur du pouvoir juridictionnel veille au bon fonctionnement de la justice et au respect de son indépendance. Il propose les projets des lois relatifs à la réforme du système juridictionnel et il est compétent pour statuer sur les questions relatives à la carrière et à la discipline des magistrats.
Article 109
Le Conseil supérieur du pouvoir juridictionnel est composé d’une Assemblée plénière, des Conseils de la justice judiciaire, de la justice administrative et de la justice financière.
Article 110
Chacun de ces organes se compose d'une moitié de magistrats élus et de magistrats nommés de cette qualité et l'autre moitié de non magistrats.
Le Conseil supérieur du pouvoir juridictionnel élit son président parmi ses membres ayant la qualité de magistrats.
Article 111
Le Conseil supérieur du pouvoir juridictionnel est doté de l’autonomie administrative et financière, il assure indépendamment son fonctionnement et dresse son projet de budget qu'il discute devant la commission compétente de l'Assemblée populaire.
Article 112
Une loi organique fixe la compétence du Conseil supérieur du pouvoir juridictionnel, sa composition, sa structure et sa procédure.
JURIDICTION JUDICIAIRE
Article 113
L’ordre judiciaire est composé d’une Cour de cassation ayant son siège à Tunis, des tribunaux de première instance et des tribunaux cantonaux.
Article 114
Le ministère public fait partie de l’ordre judiciaire. Les garanties accordées à la justice judiciaire comprennent les magistrats de siège et les magistrats du ministère public. Les membres du ministère public exercent leurs fonctions conformément aux garanties et procédures légales.
JURIDICTION ADMINISTRATIVE
Article 115
La justice administrative est compétente pour statuer sur l’excès de pouvoir de l’administration et sur tous les litiges à caractère administratif. Elle exerce une fonction consultative conformément à la loi.
La justice administrative se compose du tribunal administratif supérieur, de tribunaux administratifs de première instance et d'une Cour administrative d'appel.
Le tribunal administratif supérieur établit un rapport général annuel qu’il transmet au Président de l'Assemblée Populaire, au Chef du Gouvernement et au Président de la République.
Une loi organique fixe les règles d’organisation et de compétence de la justice administrative, ainsi que le statut de ses magistrats.
JURIDICTION FINANCIÈRE
Article 116
La justice financière se compose de la Cour des comptes avec ses différents départements.
Elle contrôle la bonne gestion des deniers publics conformément aux principes la légalité, de l'efficacité et de la transparence.
Elle statue en matière de comptes des comptables publics.
Elle évalue les méthodes d'agissement et sanctionne les fautes y afférentes.
Elle aide les pouvoirs législatif et exécutif à contrôler l’exécution des lois de finances et les clôturer.
La Cour établit un rapport général annuel et, le cas échéant, des rapports spécifiques qu’elle transmet au Président de l'Assemblée Populaire, au Chef du Gouvernement et au Président de la République. Ces rapports sont rendus publics.
Une loi organique fixe les règles d’organisation, de compétence et de procédures relatives à la Cour des comptes, ainsi que le statut de ses magistrats.
COUR CONSTITUTIONNELLE
Article 117
La Cour est compétente pour contrôler la constitutionnalité :
- Des projets de lois qui lui sont soumis, avant leur promulgation, par le Président de la République. Cette soumission est obligatoire pour les projets portant révision de la constitution, les projets de lois organiques et les projets de conclusion des traités. Elle est optionnelle pour le Président de la République ou le Président de l’Assemblée populaire ou le Chef du Gouvernement ou cinq membres de l’Assemblée populaire pour les autres projets de lois.
- Des lois qui lui sont soumis par les tribunaux, spontanément ou à la demande de l'une des parties du litige qui lui est présenté conformément aux procédures définies par la loi.
- Du règlement intérieur de l’Assemblée populaire qui lui est obligatoirement soumis par son Président.
La Cour constitutionnelle est également compétente pour :
- Constater les cas de vacances à la présidence de la République, les cas d’état d’urgence et de circonstances exceptionnelles.
- Statuer, en cas de saisine, sur les conflits de compétence entre les pouvoirs législatif et exécutif d’une part, et les conflits de compétence entre le Chef du Gouvernement et le Président de la République d’autre part lorsque le litige lui est présenté par la partie la plus diligente.
- Statuer sur les accusations portées contre le Président de la République dans les cas de violation de la Constitution et de haute trahison.
- Statuer sur les appels formés par des personnes contre des jugements définitifs rendus en violation des droits et des libertés inscrits dans la Constitution, après épuisement de toutes les voies de recours et lorsque la Cour constitutionnelle n'avait pas examiné la question dans le passé.
Article 118
La Cour constitutionnelle comprend douze membres choisis parmi les personnes compétentes ayant une expérience juridique de vingt années au moins.
Le Président de la République propose quatre membres. Le Chef du Gouvernement propose quatre membres. Le Président de l’Assemblée populaire propose huit membres. Le Conseil supérieur du pouvoir juridictionnel propose huit membres.
L’Assemblée populaire élit douze membres de la moitié des candidats proposés par chaque organe, à la majorité des deux tiers, pour un seul mandat de neuf ans.
Dans le cas où la majorité requise n’est pas obtenue, il est procédé à un nouveau vote pour élire les candidats restant à la même majorité. Si le quorum n’est pas atteint, d’autres membres sont proposés et il est procédé à une nouvelle élection selon le même mode.
Le renouvellement du mandat des membres de la Cour se fait par tiers tous les trois ans, pour le comblement de vacance dans la composition de la Cour, il est procédé au remplacement suivant le même mode de nomination.
Les membres de la Cour élisent un Président et un Vice-président parmi les membres.
Article 119
Les membres de la Cour constitutionnelle sont des magistrats couverts par les dispositions des articles 1 et 2 du chapitre sur le pouvoir juridictionnel.
Article 120
Les fonctions de membre de la Cour constitutionnelle sont incompatibles avec l’exercice de toute autre fonction ou mission régis par la loi.
Article 121
Le projet de loi inconstitutionnel est renvoyé devant l’Assemblée populaire pour une deuxième lecture et pour être modifié conformément à la décision de la Cour constitutionnelle. Le Président de la République doit renvoyer le projet de la loi, avant sa promulgation, devant la Cours constitutionnelle qui examine la conformité de la modification qui lui a été apportée à la décision de la Cour, dans un délai d’un mois.
Article 122
La Cour se limite à examiner les moyens invoqués, sur lesquels elle statue dans un délai de trois mois. Ce délai est prorogeable sur décision motivée de la Cour.
Article 123
Lorsque la Cour constitutionnelle prononce l’inconstitutionnalité d’une loi, son application est suspendue, dans les limites de ce qui a été décidé par la Cour.
Article 124
Les décisions de la Cour sont adoptées à la majorité. En cas de partage, la voix du président est prépondérante. Les décisions de la Cour sont motivées et s’imposent à tous les pouvoirs. Elles sont publiées au journal officiel de la République tunisienne.
Article 125
Une loi organique fixe les règles d’organisation de la Cour constitutionnelle et les procédures applicables devant elle ainsi que les garantis dont ses membres bénéficient.