Examen du projet de loi sur la justice transitionnelle en commission et l'audition d'un expert international en matière de réforme institutionnelle
Le jeudi 13 Juin 2013, au sein de la commission de la législation générale, les discussions se sont poursuivies avec l’article 69 qui n’a pas reçu de commentaires de la part des élus. Les articles 70 et 71 ont aussi été gardés tels qu’ils sont.
Quant à l’article 72, il a été pris en compte la revendication de certains pour l’augmentation de la peine. Concernant l’article 73, le débat s’est rapporté sur le rapport final du comité et sa diffusion au public, de ce fait sa publication sur internet. Les propositions ont été consignées ensuite concernant cet article et il y a eu passage aux articles 74 et 75 qui n’ont pas fait l’objet de critiques.
Autour de l’article 76, plusieurs questions ont été posées et qui seront discutées avec la commission technique ayant élaboré le projet de loi.
En arrivant à l’article 77 qui n’a pas reçu de critiques, la première lecture du projet de loi sur la justice transitionnelle s’est achevée et la séance a été levée.
L’après-midi, les travaux de la commission ont repris avec l’audition d’un expert international en matière de réformes institutionnelles, M. Alexander Mayer-Rieckh, expert en matière de réforme du secteur public post-conflit avec une attention particulière sur le renforcement de l'intégrité du personnel et des structures, et avec plus de quinze ans d'expérience de travail dans les pays sortant d'un conflit.
L’expert s’est attardé sur le processus de Vetting relatif à la justice transitionnelle dans les pays qui connaissent une transition démocratique après un conflit armé ou la chute d’un régime autoritaire. Ces pays doivent déterminer ce qu'il faut faire avec les fonctionnaires qui ont commis des violations des droits de l'homme. Ils doivent également examiner et réviser les structures institutionnelles qui ont permis de tels abus se produisent. Le Vetting est le processus d'évaluation de l'intégrité des personnes (comme leur adhésion aux normes relatives aux droits de l'homme) afin de déterminer leur aptitude à l'emploi public. Les pays en transition vers la démocratie et la paix utilisent souvent ces processus afin de s'assurer que les employés publics abusifs ou incompétents sont exclus de la fonction publique.
Ensuite, Samir Ben Amor a soulevé le point se rapportant au mécanisme de lustration des magistrats dans ce processus de vetting. L’expert a évoqué des expériences précédentes comme la Bosnie qui a mis en place une sorte de Conseil Supérieur de la magistrature de transition qui a servi le processus de justice transitionnelle, avant de procéder au vetting. Il a expliqué un processus de lustration douce en Pologne et en Hongrie. L’exclusion en question variaient entre 5 et 10 ans pour les élections qui ont eu lieu, argumentant que c’était nécessaire pour protéger le processus transitionnel.
Quant à la question relative aux excuses des tortionnaires, s’ils suffisaient ou pas pour se voir sortir du cercle des exclus, l’expert a insisté sur le fait que des excuses ne seraient pas suffisantes, et que de ce fait, il est impératif de suivre les mécanismes transitionnelles pour réaliser la justice.
Concernant la question de l’immunisation, l’expert avait rétorqué : « le diable est dans le détail. Je vous conseille d’éviter ce genre de procédures ».
En revenant sur l’exemple de la Bosnie, l’expert a expliqué que le processus de vetting a aidé à réaliser la lustration de 100 000 magistrats, en 2 ans. Pour la commission de vetting de la police, composée de 50 membres, elle a réalisé un chiffre de 22 000 policiers, en 3 ans.
Nadia Chaabane a mentionné la responsabilité collective: Est-ce qu’on va changer toute la société ou bien exclure des individus précis ?
L’expert a répondu que c’est toute une culture d’impunité qu’il faut changer, et qu’un policier qui a torturé n’est pas pardonnable, qu’il y a des crimes impardonnables.
Il y a eu un clivage d’avis : Nadia Chaabane condamnant le citoyen lambda qui corrompt le policier et les autres élus parlant de changement de mentalité accompagnés de condamnation des tortionnaires.
L’expert a repris la parole pour éclaircir ce point : Il faut une procédure d’examen de tout le monde. Les 22 000 policiers n’ont pas étaient tous exclus mais ont été examinés. Il est impératif d’ouvrir tous les dossiers pour savoir qui est coupable et qui ne l’est pas.
L’expert a insisté, en rebondissant sur la remarque de l’élue Nadia Chaabane concernant la complexité du processus, qu’il n’a jamais été dit que les mécanismes de vetting sont faciles à appliquer et que ça prendra énormément de temps.
L’audition s’est terminée vers 17h avec l’annonce de la présidente de la commission qu’il n’y aura pas de réunion jusqu’à mardi prochain, pour permettre au bureau de la commission de préparer le rapport ainsi que le tableau regroupant les articles présentant des divergences.