Séance plénière extraordinaire suite au meurtre de Chokri Belaid: Situation politique du pays

Vendredi 15 février 2013

La plénière du Vendredi 15 Février était consacrée à la poursuite du débat relatif à la situation politique du pays. La séance présidée par Mahrzia Labidi a débuté à 9h20 avec 65 députés présents et la liste des intervenants a été reprise là où ça s’était arrêté et voici quelques interventions :

- Fattoum Lassoued (Nahda) : Le 06 Février était un jour décisif avec l’assassinat du martyr Chokri Belaid qui nous a habitués à être parmi ceux qui ne se taisent jamais lorsqu’ils voient de l’injustice. Concernant l'initiative de Hamadi Jebali, je ne pense pas qu’il ait pensé à faire un coup d’Etat comme certains disent, il l’aurait fait sinon pendant l’ère de Ben Ali. Il a, au contraire, montré son patriotisme et a fait réaliser à cette assemblée quel pouvoir elle avait et l’a poussé à protéger sa légitimité. C’est honteux de traiter cet homme de traitre aujourd’hui.

- Habib Bribech (Nahdha) a insisté sur la légitimité de l’ANC et celle des urnes en enchainant avec la phrase qui dit « Ne demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous mais demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays ».

- Zied Doulatli (Nahdha) : L’unique solution pour surmonter cette épreuve est que toutes les forces démocratiques s’unissent pour le bien de ce pays.

- Nadia Chaabane (Bloc Démocrate) : Nous avons tous échoué : La présidence de la République, la présidence du gouvernement et l’ANC.

- Rim Mahjoub (Bloc Démocrate) : J’appelle tout le monde à soutenir l’initiative du chef du gouvernement pour le bien et l’unité du pays et la méthodologie de travail de l’ANC lui a fait perdre sa crédibilité et son président est tenu pour responsable.

- Aymen Zouaghi (Aucun groupe): L’échec du gouvernement actuel revient au manque de compétences et au fait d’exclure la deuxième force électorale dans le pays, Al Aridha. Nous ne pouvons pas faire confiance à quelqu’un qui ne respecte pas l’éthique politique en désobéissant à son parti et ses partenaires.

- Rafik Tlili (Wafa) : Le front populaire doit être représenté dans le nouveau gouvernement et je propose que Hamma Hammami soit à la tête de ce gouvernement.

- Haythem Belgacem (CPR) : L’assassinat de Chokri Belaid est le dernier dans une série d’incidents systématiques, preuve que ce gouvernement ne gouverne pas. Le gouvernement et l’opposition doivent s’unir face à cet « Etat profond » et des conférences publiques doivent avoir lieu sur les résultats d’investigations de l’assassinat de Chokri Belaid.

- Soulef Ksontini (Nahdha) a appelé à une loi contre ceux qui se prononcent contre la légitimité et qui appellent à la dissolution de l’ANC.

- Sana Mersni (Nahdha) a salué l’effort des jeunes salafistes qui sont sortis protéger les quartiers et a appelé à éviter les accusations aléatoires « rappelons que Trotski a été victime de son camarade Staline, tout comme Salah Ben Youssef par Bourguiba ». Elle a enchainé en disant que les technocrates devraient être dans les médias et les syndicats qui ont appelé à une grève générale en 24h.

- Ahmed Nejib Chebbi (Bloc Démocrate)  a rappelé ce qui s’est passé en Algérie et le danger qui menace la Tunisie en disant que l’assassinat de Chokri Belaid a causé une crise politique au sein du pays. Il a insisté sur la légitimité de l’ANC et son rôle.

- Amel Azzouz (Nahdha): C’est honteux qu’après le 06 Février certains députés parlent encore de guerre civile et de fascisme. Le discours qui appelle à l’éradication des islamistes nous rappelle le discours de Ben Ali et la conspiration contre la légitimité n’aboutira pas car le peuple ne le permettra pas.

- Kamel Ben Amara (Nahdha) a parlé d'une deuxième Troïka composée de l'ancien régime, les syndicats et les médias. Il a dit : « Il y a des députés que je vois dans les plateaux de télé plus qu’au sein de cette assemblée ». Il a enchainé en disant qu’il y a des députés responsables et prêts à protéger la légitimité de l’ANC pour mener leur mission jusqu’à la mort.

- Kamel Ammar (Nahdha) a appelé à prendre des mesures contre ceux qui laissent leurs sièges vides et n’assument pas leur responsabilité vis-à-vis du peuple.

- Mohamed Hamdi (Bloc Démocrate) : Vous êtes l’élite du pays dans une situation critique alors faites attention à vos discours. L’assassinat de Chokri Belaid nous a ouvert les yeux sur la situation dangereuse dans laquelle se trouve le pays. Je n’étais pas motivé au début pour une assemblée constituante mais je la défends et je défends sa légitimité parce qu’elle émane de la volonté du peuple et sa chute mènerait à un vide institutionnel. L’initiative de Jebali nous pousse vers un accord national et c’est injuste envers cet homme de dire qu’il prépare un coup d’Etat et représenterait maintenant la contre-révolution. Vous dites pourquoi soutenir son initiative maintenant ? Je vous dirai pourquoi pas ? Y-a-t-il une autre proposition ? J’appelle mes collègues à se libérer de leurs chaines, usez de l’argument de la légitimité à la moindre occasion vide ce principe de son sens.

- Mourad Amdouni (Aucun groupe) a parlé de système sécuritaire parallèle à l’Etat ayant pour but de terroriser. Pour lui, la légitimité n’est pas de se taire mais d’être fidèles aux principes pour lesquels ils ont été élus comme députés. Il a critiqué le silence de Ben Jaafer et la politique de la peur exercée par le parti au pouvoir.

- Chokri Yaich (Bloc Démocrate) a demandé d’annuler tout d’abord la séance relative au débat général autour du chapitre des collectivités publiques. Il a dit ensuite qu’il est impératif d’initier un débat national contre la violence et que l’ANC prenne des décisions fermes.

- Mohamed Essghaier (Nahdha) a parlé du cas de Lotfi Nagadh « Pour la dernière fois, je vous le dis, il est mort suite à un problème de santé. J’ai parlé avec des témoins pour confirmer ça et il ne faut pas le comparer à Chokri Belaid : Tout le monde n’est pas martyr ».

- Abdelkader Kadri (Nahdha) a demandé de ne pas parler au nom de partis au sein de cette salle pour éviter une campagne électorale avant son heure et a parlé d’un discours encourageant à la haine et la violence dans les médias et les réseaux sociaux. Il a rétorqué : « Comment l’UGTT prétend que la grève générale suite à l’assassinat de Belaid était une réussite ? Ce n’est pas vrai. ».

- Said Kharchoufi (Aucun groupe) a parlé des déclarations de Abdelfatteh Mourou concernant Rached Ghannouchi et la nécessité qu’il quitte le mouvement en demandant des explications. Il a aussi parlé d’interventions étrangères via des déclarations de certains ambassadeurs ici en Tunisie.

- Mahmoud Baroudi (Bloc Démocrate) a parlé de l’échec probable de l’initiative de Jebali en espérant que celle qui sera proposée lundi réussira.

- Noomane Fehri (Bloc Démocrate) a critiqué la manière de travailler de l’ANC en disant qu’il n’y a jamais eu de solution émanant de sa plénière. Il a enchainé comme suit : « On n’est pas l’élite politique du pays, on est les représentants du peuple, émanant du peuple. Il faut reconnaitre ça et coopérer avec l’élite politique qui se trouve en dehors de cette assemblée. ». En s’adressant finalement aux ministres, il leur a conseillé de se consacrer à leurs missions ministérielles au lieu de passer leurs temps d’un média à un autre.

- Souhir Dardouri (CPR) a dit que ce crime politique n’est pas une première en soi et qu’il y en avait avant et après l’indépendance et durant l’ère de la dictature. Elle a parlé d’archives et de dossiers cachés qu’il faut ouvrir afin de juger les coupables. Elle a affirmé : « Ceux qui disaient vouloir immuniser la révolution se retrouvent à immuniser la contre révolution ».

- Essia Naffeti (Nahdha) a parlé de violences entre profs concernant la grève générale et a insisté sur l’histoire évoquée par Sana Mersni de la voilée interdite d’entrer à la faculté de droit, en enchainant avec la condamnation des médias et du discours de haine.

- Sonia Toumia (Nahdha) a exprimé sa tristesse concernant l’assassinat de Chokri Belaid. Pour elle, ce crime prend pour cible la révolution. Elle a enchainé ensuite avec une lettre adressée au ministre de l’intérieur français en qualifiant ses déclarations d’ingérence et lui annonçant que ce n’est plus l’ère de Ben Ali, que les temps ont changé et qu’il n’y a plus de raison de tolérer ce genre de discours.

- Mongi Rahoui (Bloc Démocrate) a fait l’éloge de la personne de Chokri Belaid en demandant des investigations sérieuses et sans ingérence étrangère. Il a ensuite provoqué une indignation dans la salle lorsqu’il a parlé de la crédibilité de l’ANC en utilisant l’expression « Le peuple vous a vomit et cette assemblée pousse au dégoût en devenant un souk ».

- Fadhel Moussa (Bloc Démocrate) : La lettre de Hamadi Jebali à tous les partis est un signe que cet homme a compris le sens de la responsabilité et que le fait d’avouer son échec est louable en soi. Ses tentatives de créer le consensus entre tout le monde est à son honneur et nous encourage à être responsables à notre tour en tant qu’élus du peuple. Il y a une différence entre la légitimité et la légalité qui est à renouveler au quotidien en faisant le point avec nous-mêmes.

La séance a été levée un peu plus tard après avoir donné la parole à quelques députés selon l’article 89 du règlement intérieur :

- Sonia Toumia s'est plaint de ne pas pouvoir obtenir un rendez-vous avec le ministre des finances pour un dossier.

- Taher Tlili a parlé de bruits qui courent concernant la suppression de la 25% à l'examen du baccalauréat.

- Mouldi Riahi est intervenu pour dire que son bloc propose un projet de pacte contre la violence.

Avant de quitter, la présidence a annoncé que les travaux de la plénière reprendront lundi pour poursuivre le débat général relatif au chapitre des collectivités publiques, régionales et locales de l’avant-projet de constitution.