Commissions législatives: Projets de lois et auditions
Dans la matinée du jeudi 28 Novembre 2013, plusieurs commissions se sont réunies pour examiner différentes projets de lois ainsi que des auditions programmés dans leurs ordres du jour.
Pour commencer, la commission de législation générale s’est réunie afin d’examiner le projet de loi relatif à la transparence et à l'enrichissement sans cause légitime.
Jamel Bouajaja a tenu en début de réunion à condamner la campagne de dénigrement que subit la commission à cause des projets de loi qu'elle discutait, et a aussi noté l’absence des députés ayant suspendu leurs activités malgré le retrait des amendements du règlement intérieur.
Kamel Ben Amara a tenu à préciser qu’il avait présenté un projet de loi similaire au projet de l’enrichissement sans cause légitime, mais que le projet n’avait pas été transmis à la commission. Il a par la suite présenté le contexte général du projet de loi relatif à la confiscation des biens acquis d'une manière illégale et a déclaré que ce projet était aussi important que le projet de la justice transitionnelle ou d'immunisation de la révolution.
La commission a commencé par étudier tout d'abord une correspondance reçue de la part du ministère de la santé par rapport au projet de loi relatif à la pratique de la médecine et de la médecine dentaire. Les remarques parvenues de la part du ministère de la santé relatives au projet de loi concernant la pratique des métiers de médecine et médecine dentaire étaient relative à la formulation et à l’organisation des différents articles de ce projet.
Sana Mersni a communiqué des chiffres relatifs au secteur de santé en Tunisie en 2007, soit un médecin spécialiste pour 855 habitants à Tunis et un spécialiste pour 8980 habitant en régions intérieures. Aussi, Le taux de mortalité maternelle était de 39,9% à Tunis et 105,7% au centre-ouest, par rapport à 100.000 naissances, soit 3 fois plus. Par ailleurs, en 2012, le besoin des structures publiques était de 308 médecins spécialistes, uniquement 97 spécialistes avaient répondu à l'appel. Sana Mersni a aussi rappelé que 300 citoyens de Kasserine avaient adressé une lettre au ministre de la santé dénonçant le manque de médecins spécialistes
Les discussions ont par la suite été autour du projet de loi relatif à l'enrichissement de cause illégale et des décrets 13 et 120 s'y rapportant. Le but de la réunion était de détecter les points de croisement entre le décret 120 et le projet de loi. Le décret 120 concerne la mise en place d'une instance de lutte contre l'enrichissement illégale.
Jamel Touir a déclaré que l'instance détaillée dans ce décret ressemblait à l'instance de bonne gouvernance et lutte contre la corruption de la constitution, et qu’il ne fallait pas que ces deux instances se chevauchent ou se contredisent.
Kalthoum Badreddine a précisé que l'instance prévue dans la constitution aurait une valeur supérieure à l'instance prévue dans le décret 120.
Au même moment, la commission des Droits, Libertés et relations étrangères a auditionné les représentants du ministère des affaires étrangères, avec la présence de Houssine Jaziri, secrétaire d’Etat chargé de l’immigration. La question posée par les élus était relative à la capacité de la Tunisie à accueillir les tunisiens clandestins reconduits par la Suisse.
Houcine Jaziri a pris la parole pour présenter la coopération entre la Tunisie et la Suisse sur l'immigration, signée le 11 juin 2012, il a expliqué que depuis 3 ans, nombreux maghrébins étaient de retour d’une Europe en crise, et que 10000 tunisiens étaient rentrés d'Italie depuis 2011. Par ailleurs, il a déclaré que 85000 tunisiens étaient installés en Allemagne, que deux tiers d'entre eux étaient binationaux et que leur nombre étaient constant. Par rapport à la France, il a déclaré que la coopération était en dessous des attentes, 9000 permis séjour prévus par l'accord, seuls 1800 avaient été accordés.
Houcine Jaziri a aussi déclaré que 1200000 tunisiens vivaient à l'étranger, dont un million en Europe. Parmi ce million, 700000 vivaient en France. Pour les 200000 restants, ils étaient répartis dans le reste du monde. Il aussi déclaré que l’Allemagne était le meilleur pays d'accueil pour tunisiens avec peu d’entre eux en situation illégale et une majorité bien intégrée.
Pour ce qui est de l’Italie, Houcine Jaziri a déclaré qu’en 2013, sur 800 tunisiens clandestins partis en Italie, 600 étaient rentrés en Tunisie, il a aussi affirmé qu’un cinquième des prisonniers en Italie étaient tunisiens, et que 40 tunisiens étaient morts à Milan en 2012, dont la moitié qui s’était suicidée ou qui avait été tuée. Il a déclaré que pour les tunisiens en Italie, l’Europe n’était plus un rêve, mais un cauchemar. Houcine Jaziri a également déclaré que la France avait envoyé 4000 demandes aux autorités tunisiennes pour identifier des tunisiens arrêtés en situation illégale.
Par rapport à la Suisse, Jaziri a expliqué qu’il y avait 12000 tunisiens qui y étaient installés, et que dans le cadre de l’accord, la Suisse accueillerait 150 à 200 tunisiens entre 18 et 35 ans pour une formation professionnelle sur 1 an et demi. Jaziri a insisté sur l'importance de cadrer l'immigration dans le cadre d'accords de coopération bilatéraux avec pays d'accueil.
La présidente de la commission a souligné le caractère déséquilibré des accords bilatéraux en matière d'immigration, qui servent souvent les intérêts des pays européens.
Par rapport à l’accord entre la Tunisie et la Suisse, il ne prévoit pas de reconduites groupées à la frontière, sans l'accord de la Tunisie, et la formation professionnelle prévue dans l’accord Tuniso-Suisse porte sur certaines spécialités demandées par la Suisse et se déroule en Tunisie. Aussi, une enveloppe de 60 millions d'euros est prévue pour la formation professionnelle des tunisiens au départ pour la Suisse.
Jaziri a aussi expliqué que la Tunisie avait refusé une proposition italienne d'un accord bilatéral sur l'immigration, car elle était basée surtout sur des enjeux sécuritaires, et que sur les 20 dernières années, 95% des tunisiens partis en Italie ont un niveau d'études primaires, alors qu’aux Etats Unis, 60% des tunisiens sont de niveau universitaire. Aussi, 10% des tunisiens en situation illégale à l'étranger sont mineurs, et 11000 hauts cadres tunisiens travaillent dans les pays du Golfe.
Nous avons aussi pu suivre la commission de l’énergie et des secteurs de production qui a tenu une réunion avec comme ordre du jour l’examen des projets de lois N°45/2013 – 55/2013 et 74/2013.
Le premier projet qui est le N°55/2013 est celui relatif au « awqaf ». La commission a commencé par énoncer le rapport explicatif du projet et c’est son président, Chafik Zorkine, qui a demandé le passage à la discussion article par article, étant donné que le projet a été discuté dans sa totalité lors de la précédente réunion.
Soulef Ksonti avait alors pris la parole pour ajouter que l’avis de la commission de l’énergie est consultatif et qu’il faudrait, ainsi, se concentrer sur les articles qui la concerne, plus précisément la section 4, et c’est Slimen Helal qui avait précisé qu’il faudrait étudier le projet de son côté économique, avant de proposer le report de son étude vu l’actualité.
Quant à Mohamed Allouch, il a posé la question de l’utilité de l’examen de ce projet de loi en ce moment. Il a considéré que ce projet pourrait créer un conflit vu qu’il pourrait y avoir par exemple un système éducatif parallèle au système en vigueur : « Je suis de l’avis de Slimen Helal qui est de reporter l’examen du projet de loi pour une date ultérieure ».
Le président de la commission a rejoint Mohamed Allouch et Slimen Helal dont leurs propos relatifs au report de l’examen, et c’est Habiba Triki qui a mentionné qu’il faudrait reporter vu l’absence de plusieurs élus de la réunion. Mais, Soulef Ksontini a maintenu son opinion de donner un avis consultatif sur le projet, et la commission s’est entendue pour le lire dans un premier temps, puis d’examiner la section 4.
Durant la lecture, Chafik Zorkine a proposé de s’arrêter à la première section et de discuter le contenu, et Mohamed Allouch s’est attardé sur l’article 3 et a demandé quel caractère a l’institution du waqf qui va être créée, étant donné que l’article 3 en question du projet dispose que cette institution n’a pas le caractère administratif.
En réponse à cela, le président de la commission a proposé que soit mentionné le caractère de l’institution plutôt que de dire qu’elle ne revêt pas le caractère administratif.
Ensuite, Soulef Ksontini a expliqué quelques particularités de ce projet de loi aux autres élus et a évoqué le caractère temporaire ou éternel du waqf, tout en expliquant dans quels cas cela s’applique. Elle a aussi précisé que le waqf dans ce projet ne peut pas exclure les descendants sur la base du sexe et que, si une condition d’exclusion est apposée, elle n’est pas admise et le waqf est considéré valide.
Le conseiller de la commission de l’énergie a pris la parole pour expliquer le caractère non administratif de l’institution du waqf en donnant l’exemple des EPNA, qui sont les établissements publics à caractère non administratif, comme la STEG par exemple. Il a aussi mentionné que la commission des finances a décidé de reporter l’examen de ce projet pour pouvoir étudier la loi de finances pour l’année 2014.
En s’intéressant à la section 4 du projet de loi N°55/2013, les membres de la commission se sont mis à discuter l’autorité de contrôle de l’instance du waqf.
Plus tard dans les discussions, la commission est revenue sur les absences des élus lors des réunions et sur le retard que ça engendre au niveau du travail. Il a été décidé ainsi de consacrer au moins une réunion par semaine pour les projets de lois. Il a aussi été décidé d’envoyer une correspondance au ministère de l’agriculture pour une audition relative au projet de loi N°45/2013 amendant et complétant la loi N°94 de l'année 2005 à la date du 15 Octobre 2005 relative aux coopératives des services agricoles, tout comme une audition du secrétaire d’Etat à l’énergie concernant le projet de loi N°74/2013 relatif à la production de l'électricité à partir des énergies renouvelables.